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Agonir

Le maître était alité depuis la veille. Pris d'une violente toux, sa bonne avait fini par le convaincre de garder la chambre. D'en bas, elle l'entendait tousser de plus en plus fort, jusqu'à s'étouffer parfois. Elle se signait alors, craignant que son maître cette fois n'agonisât.

Elle avait envoyé Justin, le valet, chercher le docteur. Mais la jument était bien vieille elle aussi et le village à une dizaine de kilomètres.

Elle tentait de s'occuper à la cuisine, frissonnat à chaque nouvelle quinte de toux qui faisait trembler toute la maison. Elle allait préparer une soupe légère qu'elle tenterait de faire avaler au malade, au risque qu'il ne la lui recrachât à la figure. Il n'avait rien mangé depuis deux jours et cette toux persistante finirait par avoir raison de ses forces.

En milieu de matinée, elle ne l'entendit plus : il avait dû s'enformir. Et s'il était mort ?! Seigneur Marie Joseph ! Elle n'osait pas monter pour voir.

Enfin elle entendit la cariole et le médecin ouvrit la porte d'un coup sec. "Monsieur est là-haut..." prononça-t-elle tout bas. Le docteur referma la porte de la chambre et ce fut à nouveau le silence. La bonne fit signe au valet de se taire dans l'espoir de capter le moindre bruit.

Soudain un cri la fit sursauter : "Fichez-moi le camp, espèce de charlatan !" Justin se précipita pour l'aider à s'assoir. C'était bien la voix du maître et les invectives s'emplifièrent tant et si bien que le docteur finit par répondre au malade sur le même ton : la porte de la chambre claqua violemment et om redescendit les marches en jurant.

La vieille femme s'était relevée et l'interrogea du regard, n'osant parler.

"Je crains que votre maître ne soit fou : il refuse mes soins ! Mais n'ayez crainte ma bonne Germaine, la mort elle-même ne se frotterait pas à un tel caractère ! "

Et il quitta la pièce en riant très fort.

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